mardi 24 avril 2012

Mon témoignage sur le web du cercle psy


C'est quand notre fils avait entre deux et 3 ans que nous avons commencé à trouver que son comportement était étrange. Entre la naissance et l'âge de deux ans, tout semblait normal. Un bébé souriant, calme, très calme. Mais cela ne nous semblait pas bizarre. Il est vrai qu'il avait un comportement très « pèpère ».
En revoyant les films que nous avons tourné de lui avant l'âge de deux ans, nous réalisons maintenant qu'il ne suivait pas du regard les personnes autour de lui et jouait peu. Sur le moment nous n'avions pas réalisé celà. Dans les grandes lignes il semblait se développer normalement : tenue assis, marcher, manger, tout cela se faisait au bon âge. Il allait à la crèche et voyait un pédiatre et tout le monde nous disait que tout allait bien.

Mais à l'âge de deux ans tout a commencé à se dégrader. Il a commencé à avoir de gros problèmes de sommeil, à ne pas vouloir s'endormir et à se réveiller la nuit et le jour il manifestait un comportement très très hyperactif. Après avoir vu un reportage sur l'hyperactivité à la télévision, j'ai alors pensé qu'il était hyperactif. J'ai cherché des informations sur ce sujet et me suis inscrite à un groupe de discussion sur ce sujet sur internet.
Les mois ont passé et le comportement de notre fils se dégradait sérieusement : progressivement il ne communiquait plus, n'utilisait plus correctement le langage, avait un comportement incohérent et de plus en plus hyperactif. Il se mettait en colère pour tout et ne supportait plus les autres enfants. Nous avons alors commencé à consulter un autre médecin que notre pédiatre et un psychologue. Qui n'ont pas su quoi nous répondre. Les seules pistes avancées étant notre incompétence à savoir élever notre enfant.
Puis notre fils est entré en maternelle. Nous avons continué à consulter d'autres médecins et d'autres psychologues. A chaque fois les hypothèses avancées portaient sur la façon dont nous éduquions notre fils. Les uns disant que s’il avait ces problèmes de comportement c’est que nous étions trop laxistes, les autres disant que nous consacrions plus de temps à notre travail qu’à notre enfant et que c’était sa façon de nous manifester son mécontentement afin d’attirer notre attention. Nous avons même entendu d’une psychologue que plus de fessées lui ferait certainement du bien. Au final, grâce aux informations données sur internet par les maman d’enfants hyperactifs nous avons obtenu un RV avec un pédopsychiatre de l’hôpital Robert Debré, à son cabinet privé. Ce dernier a tout de suite été alerté par le comportement inquiétant de Valentin et 15 jours plus tard Valentin passait un bilan complet au service de psychopathologie infantile de l’hôpital Robert Debré.
En parallèle, à l’école cela se passait très mal. Notre fils ne tenait pas en place, ne suivait pas les consignes, restait isolé, ne supportait pas les autres enfants et courait dans tous les sens. On nous a prié de le garder à la maison. J’ai dû interrompre mon travail. Après 1 semaine de bilan complet à l’hôpital, le résultat est tombé. On m’a annoncé que Valentin était autiste. Nous ne nous m’attendions pas du tout à ce diagnostic. Pour nous, un enfant autiste, c’était un enfant totalement mutique, qui se balance et vit sans sa bulle.
Ce qui a été le plus dur, c’est d’entendre cette phrase :« Ne faites plus de projet d’avenir pour votre enfant, il se sera certainement pas capable d’apprendre à lire et à écrire ».

J’ai eu ensuite une semaine encore avec l’équipe dans ce service qui m’a apporté des conseils sur ce que je devais mettre en place pour notre fils. Mais j’ai dû chercher moi-même les professionnels pour assurer le suivi. La seule chose qu’on m’avait dite était qui devait être suivi par une orthophoniste, des séances de psychomotricité et on m’a conseillé de prendre contact au plus vite avec une association de parents d’enfants autistes + les références d’un livre à lire : « L’autisme de la compréhension à l’intervention »de Théo Peeters. C’est ce qui nous a permis de partir sur de bonnes bases.
Pendant les mois qui ont suivi, j’ai consacré tout mon temps à chercher de l’information sur Internet auprès des parents dans la même situation afin de bénéficier de leur expérience, rencontrer des associations, assister à des groupes de paroles de parents, lire des livres (il y en avait peu à l’époque), assister à des formations, des conférences, des colloques et éduquer notre fils au quotidien. J’avais du totalement abandonner mon travail. Dès l’annonce du mot autisme, notre fils était totalement rejeté de l’école. J’ai dû alors mener des longues batailles avec l’Education Nationale pour le faire à nouveau retourner à l’école, deux heures par jour, puis 1 an après à mi-temps et obtenir l’aide d’une AVS. 3 années de maternelle cauchemardesques avec des enseignantes peu coopératives et des réunions avec l’inspection académique très houleuses dont le seul but était d’empêcher notre fils de rester à l’école et de nous forcer à le faire suivre par le CMPP. L’inspecteur de circonscription m’a dit lors d’une réunion « mais pourquoi vous obstinez vous à vouloir le maintenir à l’école ? Votre fils ne saura jamais ni lire, ni écrire, il n’en sera pas capable. Il faut qu’il entre à temps plein dans un hôpital de jour, c’est là qu’est sa place. Discours appuyé par la psychologue scolaire qui ajoutait que je devais essayer le packing sur mon fils, une méthode formidable qui donnait disait- elle d’excellents résultats.
A cette époque j’ai eu plusieurs rendez-vous avec un hôpital de jour et l’équipe du CMPP de notre quartier. Ces rendez-vous étranges méritent plusieurs pages de récits à eux seuls et m’ont conforté dans mon choix de ne pas faire suivre mon fils dans ce type d’établissements où je n’ai entendu que des discours psychanalytiques et culpabilisateurs de la part des professionnels.
Mois après mois j’ai mis en place des interventions avec une équipe de professionnels très compétentes autour notre fils, tous formés aux méthodes éducatives spécifiques à l’autisme (Teacch, Pecs, ABA). Un emploi du temps bien rempli, orthophonie 3 fois par semaine, psychomotricité, interventions à domicile d’une éducatrice formée à l’autisme, programme sur mesure réalisé par une psychologue formée aux approches éducative, accueil à l’école quelques heures par semaine avec l’aide d’une AVS et dans une halte garderie spécialisée dans l’accueil d’enfants handicapés.
Pendant 3 ans, 100 % de mon temps a été consacré à l’éducation spécifique de notre fils, aux batailles avec les administrations pour faire appliquer nos droits et ceux de notre fils, aux dossiers à remplir, aux formations à suivre pour être au top des compétences en autisme afin de faire progresser notre fils au mieux.
En fin de maternelle, ses progrès étaient importants mais ne lui permettait pas de suivre sereinement une scolarité en CP. Nous souhaitions qu’il intègre une clis pour enfants TED. Faute de place sur Paris où nous habitions nous avons alors déménagé en province où une CLIS TED avait une place libre. Il y a suivi une scolarité à temps plein pendant 3 ans puis a ensuite réintégré un cursus normal à temps plein du CP jusqu’en CM2 et maintenant au collège avec suivi par un Sessad TED et une AVS.
Le petit garçon à qui on avait prédit qu’il ne saurait jamais ni lire ni écrire est en classe de 5e au collège.
Cela fait 10 ans que mon mari et moi sommes plongés dans l’univers de l’autisme. Pendant ces 10 ans je me suis impliquée à fond dans l’éducation de notre fils mais aussi dans les associations de parents afin d’aider d’autres familles. Les années passent et je constate au travers des témoignages des parents que je rencontre que les problèmes restent les mêmes. Les parents ont toujours autant de mal à obtenir un diagnostic tôt, à trouver des professionnels compétents pour suivre leur enfant, à le scolariser sans conflit, à obtenir une AVS, à obtenir des aides financières des MDPH. Ils retrouvent toujours sur leur chemin des psychiatres ou des psychologues incompétents formés aux approches psychanalytiques et non aux approches éducatives qui font perdre à leur enfant de précieuses années dans des thérapies qui ne mènent nulle part et ne font pas progresser leur enfant.
Tout cela me met très en colère. Je suis scandalisée que la France soit toujours aussi en retard sur la prise en charge des personnes autistes, enfants et adultes. Rien n’est fait en France pour que les adultes autistes trouvent leur place dans la société et soit correctement encadrés. Je suis scandalisée que les psychiatres français imposent encore dans tous les grands services hospitaliers, CMPP, hôpitaux de jour, CAMPS, formation des étudiants etc… ces théories psychanalytiques d’un autre âge et qui ne donnent aucun résultats sur les personnes atteintes d’autisme. Il est temps que ce massacre cesse en France.

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